LETTRE OUVERTE
"Voici un courrier adressé au Président de la FFF, d'un Président de club déçu et usé par l'évolution du football."
Messieurs les Présidents
De la Fédération Française de Football
Et de la Ligue de Football Professionnelle,
Depuis 30 ans, je m'investis dans un club de football créé par mes parents. Après avoir joué dans toutes les catégories, j'ai tout logiquement pris des fonctions de dirigeant, puis de trésorier et depuis quelques saisons, j'en suis le Président. Ma motivation n'était pas celle de diriger ou de commander mais plutôt une nécessité : celle de pérenniser la vie de ce club, auquel je tiens. Le haut niveau ne compte qu'un infime pourcentage du nombre des licenciés, et pourtant ce sont eux qui monopolisent la majorité des finances du football Français.
Nous en avons besoin afin de montrer l'exemple à nos jeunes. Mais depuis quelques années, nous ne nous retrouvons plus dans ce football qui ne respecte plus aucune règle, ni ses entraineurs et ses supporters.
Je ne parle même pas de l'image que donne notre équipe de France. Sans vouloir être nostalgique, ce football business ne nous ressemble plus, que l'on se réfère à notre équipe nationale où à nos équipes de ligue 1.
Nous en sommes à un point où la plupart des matchs de coupe, ligue1 ou ligue des champions sont devenus inaccessibles. C'en est fini du sport populaire puisque le football à la télévision est réservé à ceux qui en ont les moyens. Alors, comment se situer face à ce football business ?
Car ce ne sont pas les gros salaires des professionnels qui motiveront les nombreux bénévoles qui travaillent dur pour essayer de faire survivre les petits clubs. D'autre part, au-delà des résultats sportifs, pour faire évoluer nos équipes sein des différentes divisions, des mises aux normes des stades sont imposées, mais on ne nous donne pas les moyens. Les municipalités, beaucoup sollicitées, ne peuvent plus nous suivre et la situation industrielle de la France ne nous aide pas. Nous sommes dans l'impasse.
Les bénévoles doivent donner toujours plus de leur temps mais aussi de leur argent. A l'heure actuelle, cela freine l'engagement de nombreux d'entre eux, et oblige ceux qui restent à en faire chaque jour un peu plus. Nous sommes usés, à bout de force, le combat devenant trop rude. Le regroupement des clubs est la preuve du nombre décroissant de bénévoles actifs. Je sais que certains hauts dirigeants s'avancent à souligner l'aide financière de la FFF aux clubs par la dotation des Fonds d'Aide au Football Amateur (FAFA) pour réaliser certains projets, mais on oublie de dire que cette aide est dérisoire en comparaison aux frais exorbitants qui sont ponctionnés par la FFF aux travers des Ligues et Districts, et ce depuis des années.
Je tiens quand même à souligner le travail extraordinaire des bénévoles et salariés du District dans le quel mon club est affilié. Je dois dire que nous préférerions passer plus de temps avec nos licenciés. Nous avons bien mieux à faire que de chercher des financements pour subvenir aux nombreuses contraintes imposées par les règlements et régler les sanctions administratives et sportives. Quand je vois l'image donnée par certains professionnels, comment pouvons-nous exiger de nos licenciés de respecter les arbitres et adversaires. Comment expliquer également que les pelouses ne soient pas des scènes de théâtre quand on voit comment certains excellent dans l'art de la simulation.
Que dire de nos arbitres clubs ?
Si un club s'avère dans l'impossibilité de présenter son arbitre, il est sanctionné sportivement, dministrativement et financièrement. Comme si nous Présidents pouvions obliger les dirigeants à effectuer des formations d'arbitres, même si cela a au-moins le mérite de leur garantir un petit revenu. Certains d'entre eux en profitent même pour monnayer leur saison et se vendre au plus offrant. Pour nous les petits, il est difficile d'avoir un arbitre le dimanche, mais pour les gros, les grands, ce n'est pas un problème, ils en ont cinq.
Nous avons fait le choix, au sein de notre club d'avoir un tarif de cotisation faible pour ne pas faire une sélection par l'argent et offrir une chance à tous, mais jusqu'à quand pourrons le tenir ?
Ces longues années dans le football amateur me laissent croire que les petits clubs dérangent.
Nous sommes la vache à lait du Football. Si c'est une stratégie que de laisser les plus petits livrés à eux-mêmes, je vous rassure elle sera très bientôt payante. Le nombre de clubs continuera à diminuer de lui-même.
A quand un statut du bénévole qui permettrait d'encourager ceux qui s'investissent et enfin nous aider ?
Je souhaite vous rappeler que le football est aussi celui joué sur les terrains de nos villes et villages. Que feront les jeunes qui ne pourront plus faire leur sport par manque de clubs et d'équipes. Dans le meilleur des cas ils se rabattront vers d'autres sports, dans le pire, ils seront dans les rues et les quartiers avec tous les problèmes que cela engendrera. A ce moment-là, on viendra sûrement nous reprocher d'avoir failli dans notre rôle d'éducateur.
A propos d'éducateur, à juste raison on nous impose de faire des formations. Mais là encore, il faut payer. Pourquoi les ligues ne prennent elles pas en charge ces frais ?
Je vous invite Messieurs les responsables à ranger vos chaussures bien cirées dans vos dressings et à enfiler survêtements et tennis pour vous rendre compte de la réalité de nos stades.
Suite à plusieurs courriers sans réponses depuis plusieurs saisons, avec regret, j'ai décidé cette année d'étendre la liste des destinataires. J'espère qu'un jour les présidents et dirigeants des clubs amateurs auront la volonté de se mobiliser pour montrer leur ras-le-bol. Planifier par exemple un week-end de grève des matchs en guise de protestations. Néanmoins et avec regrets, cette saison j'ai décidé de laisser ma place de Président et de Dirigeant ne supportant plus l'hypocrisie de ce football qui ne me ressemble plus.
Ce n'est pas par lâcheté que ce message est anonyme mais plutôt pour protéger mon club.
J'espère que vous, Parents, comprenez pourquoi nous vous sollicitons autant.
J'espère que vous, Présidents de Clubs, allez relayer ce message avec d'autres supports et prendre la parole lors de notre assemblée générale.
J'espère que vous, Mesdames, Messieurs les Maires de nos villages, pourrez user de vos relations.
J'espère que vous, Médias, allez faire votre travail d'information.
Et enfin,
J'espère que vous, Présidents de nos instances du Football, allez prendre les bonnes mesures pour nous aider.
Dans cette attente, je vous prie d'agréer, Messieurs les Présidents, l'expression de mes sentiments les plus distingués.
Un Président Indigné"